En cette période de mobilisation sociale intense, il apparait essentiel de recontextualiser le mouvement social actuel à l’échelle de notre histoire et d’en décoder les origines.
Alors que plus d’un français sur deux soutiennent le mouvement contre la réforme des retraites, que reste-t-il de cette culture syndicale initiatrice des grandes mobilisations du 20ème siècle, celles qui demeurent au cœur des acquis sociaux d’aujourd’hui et pour lesquels les français s’estiment majoritairement inquiets ? (Sondage IFOP novembre 2019)
Incontestablement, du Front populaire aux Gilets Jaunes, notre modèle social s’est lentement fissuré, et cela sans nécessaire cause à effet, à mesure que le poids des partis politiques et des corps intermédiaires s’est réduit à peau de chagrin.
Et pourtant en juin 1936, la France comptera 6 millions de grévistes dans toutes ses régions. Au lendemain de son investiture au Parlement, le gouvernement du Front populaire réunira à Matignon les « partenaires sociaux » – représentants patronaux comme syndicaux – dans la nuit des 7 et 8 juin. Ce formidable exercice de dialogue social aboutira aux accords de Matignon qui consacreront la reconnaissance du droit syndical, le principe des conventions collectives, la représentativité ouvrière et une revalorisation des salaires d’entre 7 et 15 %. Incontestablement c’est l’un des plus grands succès de la classe ouvrière.
En avril 68, Le Monde écrivait : « La France s’ennuie ». Pourtant, à la fin du mois de mai, plus de 10 millions de grévistes feront céder un pouvoir conservateur, dans une France où la répartition des richesses reste alors bloquée par le patronat.
En novembre-décembre 1995, c’est le « plan Juppé » sur la réforme des retraites et sur l’assurance-maladie qui fédérera les mécontentements. Trop rapidement, sous les coups d’un libéralisme dopé par la mondialisation, notre pays voit ses élites politiques engager des « réformes ». Là encore, face à la mobilisation des français, le Premier ministre retirera son projet.
A nouveau au court des années 2000, dans un contexte de crise économique, de hausse du chômage et de nombreuses délocalisations, l’année 2009 voit plusieurs grèves contre la réforme des retraites de 2010 faire reculer le Gouvernement en place.
C’est donc dans ce contexte social inédit où « la réforme » et le « redéploiement des moyens » l’emportent sur ce principe central de solidarité, sur le sens des dispositifs en place et dans lequel les services publics s’ouvrent à la concurrence, que l’incertitude sur l’avenir gagne l’esprit des travailleurs, qu’ils soient salariés ou fonctionnaires.
Militants du monde de l’éducation populaire, nous demeurons pleinement acteurs et relais d’une société fragilisée, dans laquelle notre mobilisation n’a de sens que si la justice sociale demeure.
Le progrès, au profit du plus grand nombre apparait être l’une des clés du vivre ensemble et d’une fraternité réelle.
Nous rappelons que ce sont les inégalités qui génèrent une partie du repli sur soi et qui conduisent aux dérives communautaristes et nationalistes, d’autant plus que les corps intermédiaires ne jouent plus ce rôle central d’éducation populaire qu’ils assumaient jusque-là.
Nul doute qu’en cette fin d’année, la mobilisation sociale impactera dans de nombreux foyers l’état d’esprit à la veille des fêtes de fin d’année.
Au nom des membres du Conseil d’Administration et de l’ensemble du personnel, je vous souhaite de bonnes fêtes de fin d’année.